Portrait : Olivier père et fils
La Maison Olivier Père & Fils à Trélou–sur–Marne illustre le fonctionnement familial de la plupart des Maisons de champagne. De ses deux fils, Bertrand et Julien, Jean-Claude dit « y’a pas mieux». Les jeunes vignerons ont repris de concert le domaine, assurant la relève, qui s’affirme au fil des années. Les yeux de Jean-Claude n’échappent pas à leur interlocuteur. Leur couleur est frappante et le regard est charismatique.
Dans la salle de dégustation, les jeux chromatiques sont organisés avec harmonie. Ancienne cuverie devenue garage, elle a été réaménagée en bar-lounge à l’ambiance cosy. Conçue par un architecte, cette pièce se répartie en plusieurs espaces. Le visiteur peut prendre place au comptoir de style contemporain, ou s’installer au salon pour déguster les différents champagnes en toute quiétude. Les cimaises et les aquarelles rappellent l’univers d’une galerie d’art. La gamme des champagnes Olivier raconte son évolution sur le mur principal où elle s’expose au regard. Habillée de sleeve rose et bleu pale, la cuvée ‘on the rocks’ nous interpelle. Olivier Père nous explique comment elle est servie : « cette cuvée a été spécialement conçue pour être dégustée avec des glaçons, dans de larges verres à vin. A l’instar d’un cocktail rafraîchissant, on peut y ajouter un zeste de citron et de la menthe fraîche.” Ce nouveau produit propulse le champagne dans un XXIème siècle de fêtes au bord de la piscine. Les bulles nocturnes couperaient-elles le cordon longiligne qu’elles suivaient sagement ? Assurément, cette innovation dévoile un renouveau qui ne renie pas l’apport du Terroir. En quelques minutes silencieuses, le trio père et fils a remis le bar en ordre. La coordination des gestes renvoie l’image d’une entente familiale efficace dans le partage des tâches.
Après la dégustation, nous nous dirigeons vers les vignes. La terre est sèche, le vent tiède. Sous leurs chapeaux de paille les vignerons pratiquent l’ébourgeonnage qui consiste à enlever les jeunes pousses superflues afin de favoriser les rameaux fructifères. Ainsi disciplinée, la vigne entame son développement avec une meilleure répartition du feuillage, favorisant une bonne aération contre la pourriture des futurs raisins. Les sièges de vigne électriques facilitent les déplacements des vignerons dans les rangs.
Au loin, les silhouettes des enjambeurs ressemblent à des insectes aux pattes graciles. Grâce à ces tracteurs viticoles au centre de gravité élevé, les vignerons parcourent le vignoble avec vélocité.
De retour en cave, j’assiste au remuage. Cette opération a pour but de rassembler les sédiments dans le goulot de la bouteille afin de les éliminer ensuite. Aujourd’hui, le remuage est mécanisé à l’aide de caisses métalliques rotatives contenant 500 bouteilles. Auparavant, les bouteilles étaient placées sur des pupitres en bois, tête en bas, et les vignerons les tournaient manuellement chaque jour pour entraîner le dépôt dans le goulot. Bertrand propose une démonstration de dégorgement à la volée. Il enfile un tablier et prévient des risques d’éclaboussure. Bouteille à l’envers en main, il ôte la capsule qu’il remplace par son pousse. Puis, il redresse promptement la bouteille et laisse la pression expulser le dépôt, sans permettre au vin de s’échapper. Un mini pupitre de remuage, destiné autrefois au remuage des bouteilles en échantillonnage a servi à confectionner un panneau. Cette enseigne d’une grande sobriété, visible sur le parvis du domaine les jours d’ouverture, invite tout bonnement le visiteur à venir déguster la production familiale.